L’enfant qui mesurait le monde
Metin Arditi
Un
hymne à La Grèce d’hier et d’aujourd’hui.
À
Kalamaki, île grecque dévastée par la crise, trois personnages vivent l'un près
de l'autre, chacun perdu au fond de sa solitude. Le petit Yannis, muré dans son
silence, mesure mille choses, compare les chiffres à ceux de la veille et
calcule l'ordre du monde. Maraki, sa mère, se lève aux aurores et gagne sa vie
en pêchant à la palangre. Eliot, architecte retraité qui a perdu sa fille,
poursuit l'étude qu'elle avait entreprise, parcourt la Grèce à la recherche du
Nombre d'Or, raconte à Yannis les grands mythes de l'Antiquité, la vie des
dieux, leurs passions et leurs forfaits... Un projet d'hôtel va mettre la
population en émoi. Ne vaudrait-il pas mieux construire une école, sorte de
phalanstère qui réunirait de brillants sujets et les préparerait à diriger le
monde ? Alors que l'île s'interroge, d'autres rapports se dessinent entre ces
trois personnages, grâce à l'amitié bouleversante qui s'installe entre l'enfant
autiste et l'homme vieillissant. Prix Albert Bichot 2016
Écrivain
suisse francophone d’origine turque, né à Ankara et vivant à Genève, Metin
Arditi, est l’auteur de nombreux romans, récits et essais et s’est vu attribuer
plusieurs prix. Dans la plupart de ses oeuvres, il traite de la difficulté de
la filiation, de la solitude et de l’exil.
En
petits chapitres clairs, l’auteur nous plonge dans le quotidien de Grecs
d’aujourd’hui avec un réalisme poétique qui donne une vibration particulière
aux histoires et aux décors : Maraki poursuit la pêche ancestrale à la
palangre, Eliot dessine des projets, Yannis progressivement se met à
communiquer, les Kalamakiotes vivent sous nos yeux avec les soucis que le temps
présent attise : la crise, certes, les ambitions des uns, le passéisme des
autres, la beauté d’une île à préserver contre les atteintes modernes…
Le
lecteur d’emblée se sent en terre de connaissance, comment résister à ces
beautés, à ces gens qui peinent et le disent avec conviction ? Comment ignorer
ce que la politique commune a pu générer de failles et de pressions ?
Les
personnages attachants, les thèmes d’actualité, l’écriture déliée font que ce
roman se lit avec enthousiasme : on garde de la lecture ces séquences poétiques
où l’architecte converse avec sa fille morte par l’entremise de l’ordinateur où
elle consignait ses recherches sur les théâtres antiques ; où l’enfant et son
père d’adoption s’amusent et s’apprivoisent par le biais de dessins. Sans
oublier les confidences d’un pope, qui n’a jamais oublié de réserver, à l’insu
de toutes et de tous, du temps à son amant.
L’auteur
sait, ô combien, mener son intrigue, ménager des plages plus aérées et un
suspense de bon aloi, pour nous mener à une réflexion assez profonde sur les
liens filiaux et les réseaux d’affection dans un monde qui ne pourrait être au
pire qu’un vase clos, mais on le sait, la parole libère et l’enfance parfois
offre des miracles. (Philippe Leuckx)
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